‘Folles femmes' de Gabriela Mistral : des femmes qui (se) manifestent en poésie ?
Irène Gayraud  1  
1 : Philomel, Littérature comparée
Sorbonne Université

Le projet de cette communication serait de s'intéresser à la section « Folles femmes » du recueil Lagar (1954) de Gabriela Mistral, poétesse chilienne et prix Nobel de littérature 1945. Gabriela Mistral, sa vie durant, n'a eu de cesse de défendre la cause des femmes en Amérique Latine, en écrivant notamment pour le droit de vote et pour l'éducation des femmes, mais sans jamais révéler au grand jour son homosexualité. C'est surtout dans ses vers que peut se lire ce désir de donner une place en poésie aux figures féminines, en particulier dans la suite de quinze poèmes réunis dans la section « Folles femmes » : Gabriela Mistral y met en scène des femmes désignées le plus souvent par un substantif qui caractérise une situation fondamentale de leur vie (« L'abandonnée », « La fugitive », « La danseuse », « L'humiliée », « La Fervente »), situation que le poème travaille, dessinant des figures féminines en souffrance ou en lutte, s'intéressant à leur gestes les plus quotidiens, ou célébrant leur immense pouvoir créatif, qu'il passe par la danse ou par les mots, dans des poèmes à vocation plus métapoétique. Ces poèmes, dont beaucoup sont écrits à la première personne du singulier et donnent voix et corps à ces femmes, sont également la manifestation de la puissance de résistance féminine face une vie difficile ou broyée, résistance qui passe tantôt par une passion ardente, extrême (donnant tout son sens au titre de la section), mais parfois aussi par une vie hors du monde : le poème mistralien devient la manifestation poétique d'une vie ne parvenant plus à se manifester.

 

Irène Gayraud est MCF en littérature comparée à Sorbonne Université. Elle a publié Chants orphiques européens. Valéry, Rilke, Trakl, Apollinaire, Campana et Goll aux Classiques Garnier en 2019. Elle a traduit, en collaboration avec Christophe Mileschi, les Chants Orphiques et autres poèmes de Dino Campana (Point, 2016). Elle a peu travaillé sur le genre, si ce n'est sur une inversion genrée autour de trois mythes (Philomèle, Orphée et Pénélope) dans la poésie de Michèle Finck (article à paraître en mai 2019 dans la revue Nu(e), mais s'y intéresse de plus en plus. Actuellement, elle prépare une traduction de deux recueils de poésie de Gabriela Mistral.



  • Poster
Personnes connectées : 38 Vie privée
Chargement...