Audre Lorde, poète
Sandrine Montin  1  
1 : CTEL, Littérature comparée
Université Côte d’Azur

Audre Lorde est née à Harlem de parents antillais (d'une mère originaire de la Grenade et d'un père originaire de la Barbade) en 1934. Poète, documentaliste, enseignante, activiste (prenant part au mouvement des Droits Civiques, au Black Arts Movement, et à la scène féministe et lesbienne), elle a épousé un homme blanc, Ed Rollins, dont elle a eu deux enfants, Elizabeth et Jonathan, avant de divorcer. Auteure de nombreux essais, conférences, livres d'autobiographie, et d'une dizaine de recueils de poésie, active non seulement aux Etats-Unis mais également en Europe, notamment en Allemagne où elle a contribué à l'émergence de la conscience féministe noire allemande, elle se présentait elle-même comme « Noire, lesbienne, féministe, guerrière, poète, mère ». Après avoir lutté contre un cancer du sein, elle est décédée à Sainte-Croix dans les îles Vierges des Etats-Unis en 1992.

Si les oeuvres en prose de la poète américaine Audre Lorde (1936-1992) sont aujourd'hui disponibles en français, il n'existe pas encore d'édition française de sa poésie. Le groupe de recherche « Audre Lorde », au sein du laboratoire CTEL de l'Université Côte d'Azur, réunit depuis mars 2018 sept enseignants chercheurs et traducteurs écossais, anglais, français, anglicistes et comparatistes travaillant collectivement à la traduction complète des poèmes : Deborah Bridle, Geneviève Chevallier, Odile Gannier, Sandrine Montin, Ellen Rothnie, Catherine Schnoor, Jeff Storey.

Cette communication, issue du travail de traduction collective du groupe Audre Lorde, s'intéresse à la façon dont la poète construit une posture auctoriale genrée et lesbienne, négociant ou jouant avec le spectre de la censure et de l'autocensure.

Significatif est le cas du poème « Love Poem », explicitement homosexuel, que Lorde a accepté de retirer de son troisième livre, From a Land Where Other People Live (Broadside Press, 1973) à la demande de l'éditeur. C'est à la faveur d'un réseau et en présence d'amies, activistes et auteures féministes, parmi lesquelles Adrienne Rich, que Lorde lit publiquement le poème avant de le publier en revue (février 1974) et de le placarder sur le mur du département d'anglais de John Jay où elle enseignait.

Si ce poème peut être considéré comme un « manifeste » lesbien, le cinquième recueil de Lorde, Coal, publié en 1976, est composé en majeure partie de poèmes issus de ses deux premiers recueils, The First Cities (1968) et Cables to Rage (1970), soit des recueils antérieurs à ce manifeste. Les variantes introduites dans la réédition modifient les poèmes, féminisant l'aimée, ou effaçant les manifestations d'hétérosexualité. Mais ces variantes proposent aussi une relecture des deux premiers recueils, comme étant toujours déjà lesbiens, mais voilés par une forme d'(auto-)censure. Coal se donne ainsi à lire comme une révélation et une manifestation authentique de la première poésie de Lorde.

Nous aborderons enfin les questions qui se posent à la traduction de Coal. Le passage de l'anglais, moins genré, comme dans le cas du mot « lover » par exemple, au français, impliquant un positionnement et un choix clair des traductrices et traducteur, entre neutralité et « genre manifeste ».

 

Le groupe de recherche « Audre Lorde », au sein du laboratoire CTEL de l'Université Côte d'Azur, réunit sept enseignants chercheurs et traducteurs travaillant collectivement à la traduction complète des poèmes.

Deborah BRIDLE, PRAG en anglais, travaille sur la littérature anglophone fantastique. Sa prochaine communication propose notamment d'analyser l'articulation des voix du féminin et du féminisme dans le genre de l'horreur chez China Miéville. Elle travaille également en traduction (scripts pour la télévision et le cinéma, et traduction technique). 

Geneviève CHEVALLIER, maître de conférences en anglais, enseigne la traduction et la littérature de langue anglaise. Sa traduction de l'anthologie Negro de Nancy Cunard est en cours de parution. Traductrice de divers poètes anglophones ou francophones, elle collabore actuellement à l'édition bilingue de l'anthologie de poésie française traduite par John Montague. 

Odile GANNIER, professeure de littérature générale et comparée, est co-responsable de l'axe « Écritures de l'altérité et de la singularité » du CTEL, et co-pilote un projet Idex : « 1918-1968-2018. Cent ans d'expression féminine ». Elle travaille également sur la littérature de voyage et l'anthropologie culturelle.

Sandrine MONTIN, maître de conférences en littérature comparée, a consacré sa thèse à la poésie du début du XXe siècle (G. Apollinaire, B. Cendrars, T.S. Eliot, F. G. Lorca, Hart Crane). Elle travaille sur les relations entre poésie et cinéma et sur le théâtre.

Ellen ROTHNIE a enseigné l'anglais en Espagne et à Nice et effectué un stage de traduction à Bruxelles. Son dernier travail de traduction a été le roman Faussaire de J.F Ferrillon. Elle a également traduit les poèmes de la poète azuréenne Sabine Venaruzzo pour un court-métrage.

Catherine SCHNOOR, professeure agrégée à l'université de Nice, enseigne la version anglaise dans le département de Lettres depuis 1996 et a traduit différents travaux de recherche et articles en anglais.

Jeff Storey, maître de conférences en anglais, est spécialiste de littérature nord-américaine. Il a également travaillé en tant que traducteur et interprète. Ses recherches abordent régulièrement la question des gender studies (publications sur Margaret Atwood, enquête sur l'absence de femme dans le modèle narratif du ‘parcours du héros' de Joseph Campbell).



  • Poster
Personnes connectées : 25 Vie privée
Chargement...